Hélène Alexiou est diététicienne. Diplômée de l'institut Paul Lambin, elle possède également un master en sciences biomédicales. Actuellement, elle occupe le poste de maître-assistante au sein du département diététique et est membre de la CeRED, la cellule de recherche et d'expertise en diététique.
Elle est l’une des deux experts représentant la Belgique auprès du Comité Scientifique européen du Nutri-Score, un groupe mis en place début 2021.
Bonjour Hélène, peux-tu nous parler du projet Nutri-Score ? Comment y es-tu impliquée ?
Le Nutri-Score a été créé et mis sur pied par des chercheurs de Santé Publique France en 2017, sous l'égide du professeur Serge Hercberg. Il est implanté en Belgique depuis 2018.
En 2021, il est adopté par 7 pays européens. Cette même année, des scientifiques indépendants, un à deux scientifiques par pays ayant adopté le Nutri-Score, ont formé un Comité Scientifique, afin d’y intégrer les dernières connaissances scientifiques, de le faire évoluer, notamment via un meilleur alignement avec les différentes recommandations nationales en matière d’aliments.
En effet, la nutrition étant une science qui évolue très rapidement, il était temps de mettre l’outil à jour. L’algorithme sous-tendant le Nutri-Score n’a pas radicalement changé, mais il s'agissait plutôt d'identifier les domaines qui nécessitaient une amélioration.
Ce travail a abouti à un nouvel algorithme, publié en 2023 et qui est entré en vigueur en Belgique le 1er janvier 2024.
Et donc, le Nutri-Score fonctionne sur base d'un algorithme ?
Oui, c’est exactement cela. Pour rappel, le Nutri-Score, c'est ce logo visuel visible sur la face avant des emballages et qui comporte une échelle composée de 5 couleurs et 5 lettres. Il prend en compte la composition nutritionnelle du produit, c’est-à-dire des éléments tels que l'énergie, le sel, la teneur en sucres, en fruits, les légumes et légumineuses, en protéines, etc. L’algorithme va prendre en compte toutes ces valeurs nutritionnelles (en fonction de leur quantité dans l’aliment), et un score final, unique, est déterminé. En fonction de ce score, vous obtenez la valeur nutritionnelle globale du produit. Celle-ci est associée à une lettre et une couleur, représentant la qualité nutritionnelle du produit : le vert foncé est associé à la lettre A (la qualité nutritionnelle la plus favorable) et l’orange foncé est associé à la lettre E (une qualité nutritionnelle plus défavorable).
En quoi le Nutri-Score est un outil intéressant pour les consommateurs ?
Par exemple, sur un emballage, il est spécifié qu’une céréale de petit-déjeuner contient 1g de sel. Comment savoir facilement si c'est beaucoup, ou pas ? Lorsque le consommateur regarde la déclaration nutritionnelle, c'est-à-dire le tableau que l’on retrouve à l'arrière d'un emballage, comment interpréter les valeurs ?
L'idée du Nutri-Score est de traduire ces chiffres difficilement compréhensibles en quelque chose de simple et surtout de visible sur la face avant de l'emballage.
Ce qui est également intéressant, c'est que cela permet de comparer des aliments comparables, d'une même catégorie pour un même usage. Certains produits peuvent avoir une image santé alors que si on calcule le Nutri-Score, on se rend compte que ce n'est pas tellement le cas, car ils peuvent contenir beaucoup de sel et de sucre.
Le but du Nutri-Score n'est évidemment pas de comparer de l'huile d'olive et du chocolat. On sait qu’il faut manger le moins ultra transformé possible et favoriser les produits cuisinés maison. Un chocolat sera toujours Nutri-Score E, mais on sait qu’il s’agit d’un aliment qui se trouve dans la pointe de la pyramide alimentaire et qui est donc à manger avec parcimonie.
Pour en revenir au consommateur, toujours au rayon des céréales pour le petit déjeuner, il pourra peut-être se dire : “Tiens, si j'ai envie de manger plus sainement, je vais plutôt me diriger vers les céréales avec un score A et B plutôt”.
Tu nous disais que le Nutri-Score avait évolué il y a peu. Concrètement, qu’est-ce qui a changé ?
On parlait des céréales pour le petit-déjeuner et justement, elles font partie des aliments impactés par les modifications. Il a été identifié qu’elles n'étaient pas assez “mal classées”. Même chose pour les laitages sucrés. L’algorithme mis à jour adopte une approche plus stricte pour les produits sucrés, mais également pour les produits à forte teneur en sel. Les huiles sont également mieux ‘différentiées’, et les huiles avec une composition intéressante, telles que l’huile d’olive, pourront être classées B.
Il est important de noter que le Nutri-Score n’est pas un outil obligatoire dans l’Union européenne. Cependant, si une marque décide de l'adopter, elle doit le faire sur tous ses produits.
Avec le nouvel algorithme, le fabricant aura alors un délai de 2 ans pour adapter l’emballage de son produit. Il est donc normal de voir encore, lorsqu'on se promène dans les rayons, des produits qui ont l'air très sucrés et qui sont encore classés B.
Pour en revenir à la HE Vinci, ce projet entre en compte dans les missions de la CeRED, la Cellule de Recherche et d'Expertise en Diététique. Quels autres projets menez-vous au sein de cette cellule ?
La CeRED a été créée en 2011 pour répondre aux demandes diverses et croissantes adressées au département diététique en termes d'expertise ou de recherche.
Concrètement, nous sommes actifs dans des groupes de travail dans le domaine de la santé publique. Le Nutri-Score en fait partie. Nous exerçons également des mandats au sein du Conseil Supérieur de la Santé.
La CeRED a trois types de missions : des missions de recherche, d'expertise et de service à la collectivité. La cellule intervient également dans des missions de consultance comme la rédaction de rapport d'expertise nutritionnelle. Nous sommes également sollicités par des entreprises agro-alimentaires, qui nous demandent notre avis sur le développement de la composition d'un produit.
Nous participons également à des projets de recherche qui impliquent de la diététique appliquée, notamment via l’exploitation de notre cuisine qui nous permet de mettre au point des repas de composition donnée, entre autres.
La Cellule est aussi active au service à la collectivité. En effet, nous répondons régulièrement à des demandes, que ce soit de la part de journalistes ou autres. Nous participons également au développement d'outils tel que la pyramide alimentaire utilisée du côté francophone du pays avec Food in Action.