Simon Dubetz est enseignant dans le département Assistant en psychologie dont il est lui-même diplômé. Plus spécifiquement, il coordonne depuis quelques années l’option Approches plurielles en psychopédagogie.
Face aux enjeux socio-environnementaux, ce grand convaincu de l'importance du lien entre l'humain et la nature, nous invite à sortir des murs de nos maisons, lâcher nos écrans, rencontrer le monde qui nous entoure, la nature, les autres et les animaux.
Bonjour Simon, peux-tu nous dire en quoi consiste la zoothérapie ?
La zoothérapie, aussi appelée médiation animale, est une pratique complémentaire à l’intervention psycho-sociale qui va proposer une rencontre entre un ou une bénéficiaire ou un groupe de bénéficiaires, un animal et un ou une professionnelle formée en zoothérapie. Une séance peut avoir lieu au contact de chiens, de chevaux, de poules, de dauphins, de tortues, ...
Le lien homme – animal existe depuis très longtemps mais c’est en Belgique, à Geel, que les prémices de la zoothérapie ont émergé au début du XIXème siècle dans un centre pour ceux et celles qui étaient alors considérés en tant que “déficients mentaux”. Des professionnels ont commencé à mettre en lien les bénéficiaires avec les animaux de la ferme et ils ont observé des avancées significatives. Ensuite, c’est Boris Levinson, pédopsychiatre américain, qui dans les années 60 a posé les bases théoriques de cette approche qu’il a nommée « psychothérapie de l’enfant assistée par l’animal ». Comment est née l’idée de cette mise en présence ? Boris Levinson est, un jour, venu avec son chien en séance. Il a alors constaté qu’un enfant autiste qui ne rentrait pourtant jamais en contact avec lui, s’intéressait à son chien. Il avait des interactions sociales avec l’animal. Les bases de la zoothérapie étaient posées.
Comment le projet de formation en zoothérapie est-il né à la Haute Ecole ?
Dans le cadre d’un cours de bloc 3 appelé « Exercices pratiques d’approches plurielles en psychopédagogie », nous sommes plusieurs enseignants à proposer à nos étudiants des initiations à diverses approches et médias. L’idée est d’ouvrir le champ des possibles pour leur futur métier d’assistant en psychologie. Ce cours est passionnant, car il permet de faire vivre les différentes approches à nos étudiants pour ensuite les ancrer au niveau théorique. A côté des pans systémiques, artistiques, cliniques, psychoéducatives, il nous a semblé pertinent d’aussi proposer une ouverture à la zoothérapie.
Combien d'étudiantes et étudiants ont pu à ce jour suivre des cours liés à la zoothérapie à la Haute Ecole ?
En 2023, nous avons organisé la première après-midi complète d’initiation à la zoothérapie. Environ 50 étudiants ont pu suivre le cours animé conjointement avec l’ASBL Izis (Zoothérapie Belgique - Nouveau centre Daphné Stadnik. En effet, n’étant pas formés à la zoothérapie, nous avons convié des experts pour nous accompagner. Les étudiants ont pu découvrir d’un point de vue théorique ce que recouvre la zoothérapie avant d’expérimenter cette discipline au cours d’un atelier de deux heures avec des lapins, des cochons d’Inde ou des chiens. La fin du cours avait pour but de créer des ponts avec leur formation et leur future pratique : en quoi la zoothérapie pourrait être un outil complémentaire à leur bagage actuel ?
Une formation continue en zoothérapie est aussi organisée au sein de la HE Vinci.
Quelle place pour la zoothérapie dans la société, aujourd’hui ? En Belgique ? En Europe ?
En Belgique, on parle plus facilement d’hippothérapie avec de nombreux centres présent et reconnus, je ne sais pas trop pourquoi le cheval est si présent en Belgique. Un certificat en 4 ans est d’ailleurs co-organisé entre autres avec la HE Vinci. Personnellement, j’ai déjà pu expérimenter cette approche avec mes bénéficiaires, mais aussi avec mon fils. C’est passionnant et déroutant à la fois. Malgré ma peur des chevaux, je dois bien admettre que cela fonctionne.
La zoothérapie au sens plus large commence à faire sa place dans le paysage belge et de nombreuses initiatives voient le jour que ce soit avec des personnes âgées, des enfants ou encore des personnes en situation de handicap. Des études prometteuses montrent les effets bénéfiques de la présence des chiens sur l’épilepsie, mais aussi pour les contacts sociaux des enfants autistes.
Hors Europe, le Québec est aussi particulièrement actif autour de la zoothérapie.
Quid de la demande ? Des débouchés de la formation ?
Je suis convaincu qu’il est temps de se remettre en lien avec la nature. Il faut continuer de faire évoluer le travail psycho-social, réinventer les approches et les manières de travailler. J’ai pu constater que nos étudiants étaient captivés par cette démarche et qu'en plus de les apaiser, le contact avec les animaux (malgré l’approche du TFE et des examens) les a inspirés pour leur futur professionnel.
Je pense aussi qu’il faut des professionnels formés pour encadrer cela. Il faut toujours se poser la question de pourquoi et pour quoi on le fait. Ce n’est pas une recette magique, c’est une approche complémentaire sérieuse qui nécessite une formation et un regard critique. Mettre un animal en lien avec un bénéficiaire n’est pas suffisant, c’est le travail qu’on va apporter autour de cette rencontre qui importe.
Quels résultats thérapeutiques la zoothérapie a-t-elle déjà pu montrer ?
Outre les résultats sur l’épilepsie et l’autisme dont j’ai déjà parlé, on remarque une diminution de l’anxiété, un effet sur le burn-out, une meilleure confiance en soi, un impact sur certains handicaps,…
A qui s’adresse une formation en zoothérapie ?
Comme je le disais, c’est une modalité complémentaire, il faut avoir une formation de base d’ intervenant psycho-social et je pense, une expérience clinique au préalable. L’important est, selon moi, que cela reste une approche sérieuse et rigoureuse. Tout le monde ne peut pas se déclarer spécialisé en zoothérapie.
Cette année 2024, nous allons très certainement refaire notre animation, avec pourquoi pas, la participation de quelques collègues supplémentaires afin de leur faire aussi découvrir cette approche.
Manon Kohnen, diplômée en tant qu'assistante en psychologie, option «Approches plurielles en psychopédagogie » nous partage son expérience
"Au cours de mon cursus, et plus particulièrement au cours de ma première année, j’ai entendu parler de la zoothérapie et plus particulièrement de l’équithérapie pour les personnes en situation de handicap. Cependant, je ne m’étais jamais intéressé à la pratique même de la zoothérapie. C’est lors de ce module que j’ai pu découvrir cette pratique plus en profondeur avec les lapins. En effet, les étudiants pouvaient choisir entre des hamsters, des lapins ou encore des chiens.
Souhaitant continuer à travailler avec des enfants et des adolescents, je pense que la zoothérapie peut être très intéressante. En effet, le contact avec les animaux peut venir calmer et apaiser les tensions. Travaillant également avec des enfants ayant une phobie scolaire, la zoothérapie peut être un réel accompagnement pour ces élèves. Cela peut donner plus de possibilités aux enfants de se développer sereinement.
La zoothérapie peut s’adapter à tout âge et à toute personne, car le travail peut se faire avec différentes races d’animaux.
Je souhaite ajouter que le module auquel j’ai pu participer m’a appris que les animaux peuvent être un grand soutien aux humains."