Fabrice Nouvel
Voir le magazine- Métier(s)
- Ergothérapeute
- Président de l'association française des ergothérapeutes en gériatrie
Bonjour Fabrice, pourriez nous parler un peu de votre parcours ?
Diplômé en 1992, je me suis rapidement passionné pour la gériatrie. J’ai eu la chance de côtoyer Max Abric, pionnier de l'ergothérapie en gériatrie en France, inventeur des méthodes d'activation motrice (approche qui vise à stimuler et améliorer les mouvements des personnes âgées par différentes techniques).
Ensuite, j’ai collaboré avec le Dr Jean-Marc Jacquot. Ensemble, nous avons développé des techniques de prise en charge spécifiques. Nous avons notamment créé des aides techniques comme les guidons de transferts (un dispositif qui aide une personne à passer d’une position assise à debout, ou à se transférer d’un fauteuil à un lit), les barres de redressement, les sangles de rehaussement et une méthode d'activation motrice.
En 2005, je crée l'Association Française des Ergothérapeutes en Gériatrie AFEG, dont j'ai assuré la présidence jusqu'en 2022. En 2008, j'ai lancé la clinique du positionnement et de la mobilité et le centre de recherche CEDMH du CHU de Nîmes. Je fonde la société Soft'Ages Formations la même année pour développer des formations continues à l'attention des ergothérapeutes, sur les thématiques liées à la gériatrie.
Pourriez-vous nous présenter Soft'Ages Formations en quelques mots ?
Soft'Ages Formations a été créé en 2008 en partant d'une volonté d'apporter une spécialisation en gériatrie aux ergothérapeutes. Au fil du temps, le public et les modules se sont diversifiés. Nous nous sommes spécialisés dans la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson, la prévention des chutes, le positionnement au fauteuil roulant, etc. Nous formons plus de 1000 stagiaires par an dont une majorité d'ergothérapeutes en France, Belgique, Luxembourg et Suisse.
Qu’est-ce qui vous a motivé à vous spécialiser dans la réadaptation des personnes âgées ?
Ce sont les rencontres avec des ergothérapeutes passionnées en gériatrie qui m’ont motivé à me spécialiser : Max Abric (créateur de l'ergomotricité en gériatrie), Amy Martin (créatrice des premiers pictogrammes d'autonomie), et d'un gériatre visionnaire, le Dr Jean- Marc Jacquot qui dès les années 90, nous a incité à développer des techniques, méthodes et de faire de la recherche clinique.
Le syndrome de désadaptation psychomotrice est encore méconnu du grand public. Quels en sont les signes les plus fréquents et pourquoi est-il si important de le prendre en charge rapidement ?
Ce syndrome a d’abord été connu sous le terme de Post fall ou Post-Chute (syndrome identifié par J. Murphy en 1982). Murphy identifiait, après une chute, des conséquences motrices et psycho comportementales qui entraînaient rapidement une situation de dépendance.
Plus tard, le Dr Gaudet a décrit des signes visibles de ce syndrome comme la rétropulsion (tendance à tomber en arrière), la stasobasophobie (peur de rester debout), l'hypertonie oppositionnelle (rigidité musculaire et une résistance aux mouvements). Il a aussi élargi les causes possibles, en incluant le fait de rester trop longtemps alité, les traumatismes psychologiques et une aide excessive de l'entourage.
Ce n’est que dans les années 2000 que l’on a mieux compris ce syndrome et son lien avec la fragilité.
En effet, ce syndrome apparaît lorsque certaines parties du cerveau, responsables des mouvements automatiques, s'affaiblissent. Il est donc souvent associé à des maladies chroniques qui touchent ces zones, comme des problèmes de circulation dans le cerveau, l’accumulation anormale de liquide cérébral (hydrocéphalie) ou certaines formes de démence.
Il est donc important de préciser que ce syndrome n'est pas lié au vieillissement mais à des pathologies pouvant survenir lors de l'avancée en âge.
Quelles sont les techniques ou approches les plus efficaces pour aider une personne âgée à retrouver une meilleure posture et mobilité ?
Il y a deux cibles importantes : la prévention pour éviter l'apparition du syndrome de désadaptation psychomotrice et la prise en charge du syndrome quand il est établi. La prévention joue un rôle essentiel. Les signes précurseurs d'une fragilisation des automatismes moteurs sont essentiellement des modifications de l'organisation des séquences motrices. On parle de dégradation des schémas moteurs.
La technique principale dans ce syndrome est l’activation motrice, qui consiste à utiliser des méthodes pour stimuler la mémoire des mouvements et aider la personne à retrouver ses capacités motrices. Quand les aidants ou soignants utilisent des techniques de manipulation mal adaptées, cela peut aggraver la perte de ces mouvements naturels et augmenter la peur de tomber (la stasobasophobie).
Les aides techniques, comme les guidons de transfert, jouent également un rôle crucial, car elles permettent de remplacer les manipulations manuelles et offrent un meilleur soutien. Il existe aussi d'autres méthodes spécifiques pour réduire les symptômes.
Quels sont les principaux objectifs de la formation que vous dispenserez en mai 2025 et à qui s’adresse-t-elle en priorité ?
Cette formation est spécialement conçue pour les rééducateurs. Son but est de leur apprendre à diagnostiquer le syndrome de désadaptation psychomotrice, à reconnaître ses signes cliniques et, surtout, à maîtriser les techniques d'activation motrice. Ils apprendront aussi des méthodes spécifiques pour traiter les problèmes d’équilibre, de peur de tomber (stasobasophobie) et l’utilisation des différentes aides techniques. En résumé, c’est une formation très pratique et axée sur des objectifs concrets pour améliorer la prise en charge des patients.